OUESTIME

12Mé & Raph - Voicing


L’histoire commence en 2006 (si ma mémoire est bonne) dans les rayons de la Fnac. Lassé de voir les artistes que j’exècre au premier plan des devantures, je fouille dans les bacs et tombe sur un album, « Headphones 0.1 », qui ne me dit absolument rien. Ce sera mon seul achat et résultat : cinq ans plus tard le disque tourne fréquemment dans mon iPod ou dans ma platine.


A l’époque, j’avais adoré cet aspect non-léché, un peu brut, un MC épaulé d’un saxophoniste, sans chercher à se prendre la tête. Pas de fioritures, 12Mé (MC) & Raph (saxo) vont à l’essentiel : instrus légères, flow fluide et efficace, paroles drôles, amusantes, mais aussi ces récits du quotidien, ceux que tout le monde vit, conçoit, déteste ou adore. Un album qui me parle directement, sans grosses prods, sans musiques chiadées et poussées à l’extrême et finalement, presque sans âme.

Entre temps, j’ai apparemment raté un second opus sorti encore une fois (trop) discrètement. Ainsi soit-il. J’ai récemment reçu ce qui signe le troisième volet du rappeur et du saxophoniste, « Voicing ». Il y a quelque chose de prévisible dans cet album. 12Mé & Raph n’ont pas mis de côté cet aspect légèrement artisanal qui m’avait tant plu. Au contraire, le vice est poussé plus loin, mais le tout est plus propre, plus soigné, plus lisse. Je me lance donc dans un album plus « professionnel », peut-être aussi tout simplement plus mûr que le précédent. Mais ce n’est pas pour déplaire.

Raph passe plus souvent au micro, enchaine les refrains et chantonne de manière parsemée sur l’album. 12Mé lui n’a rien perdu de ce flow direct et sans détours. Typiquement le genre de mec que t’écoute quand les choses vont bien, petit smile dérobé, jolies filles dans le rétroviseur, bières fraîches et ambiance entre pote. La vie est belle, quoi, merde. Et tout ça se ressent dans les textes, même si certains (« Rendez-vous manqués ») sont plus durs.

On plonge. Le MC balance la sauce directement sur l’introduction du disque. Tout le monde est dans le bain, jusqu’aux épaules, et les vertèbres commencent à craquer. Bravo pour l’exercice de style sur « L’ombre de soi », entre autre. Retour sur terre avec « Tranche de vie » ; Traitement du quotidien sur « Retour en ville » ; etc.

J’ai adoré le côté éclectique, les influences diverses, ces boom-bap 90’s incessants, et les petits rythmes avec ce côté presque samba (« Quart de siècle »). Cette manière de faire passer d’un univers à un autre, sans passer par la manière radicale, puisque la formule MC-saxo est omniprésente. Bref, voici un album qui ravira tous les déçus du rap français.

Neska